Marcel Thomazeau :  » Nous avons essayé de construire un Etat capable d’aider la population française à remonter le courant « 

Marcel Thomazeau :  » Nous avons essayé de construire un Etat capable d’aider la population française à remonter le courant « 

Compagnon de cellule de Marcel Paul, Marcel Thomazeau, a été le secrétaire particulier de son ami, devenu ministre de la Production industrielle en 1945.

Communiste, déporté, ami et secrétaire particulier du ministre Marcel Paul, ancien dirigeant de « La Marseillaise », Marcel Thomazeau, 98 ans, dialogue depuis le début des années 2000 avec les nouvelles générations pour que jamais personne n’oublie. Nous l’avons interrogé à l’occasion de la journée nationale de la Résistance le 27 mai.

Que vous inspire cette Journée nationale de la Résistance, célébrée à la date de la première réunion du Conseil national de la Résistance ?

Marcel Thomazeau : C’est une chose très importante car nous devons toujours considérer cet événement prometteur pour la France. Ce qu’il a été par la suite avec les Jours heureux et la mise en place du programme de la Résistance.

Où étiez-vous ?

M.T : J’étais encore à Gusen, un camp de travail forcé qui dépendait de Mauthausen. Je devais peser dans les 34 kilos, j’étais à deux pas de mourir. J’ai appris la libération de la France bien après et je suis rentré beaucoup plus tard, en janvier 1946.

Aujourd’hui, c’est cette histoire que vous transmettez à la jeunesse. Quel est le message que vous passez ?

M. T. : Mon message, c’est d’avoir beaucoup d’espoir dans l’avenir quelles que soient les difficultés. Il faut se battre pour la victoire et sa victoire personnelle, déjà, sur la vie. Dans les camps où j’étais, à Mauthausen, à Gusen, chaque minute je pensais : ils veulent m’avoir, je vivrais. Avec cet aspect différent d’aujourd’hui, nous connaissions l’ennemi, la peste noire qu’il fallait combattre et abattre.

On compare la crise sanitaire et ses conséquences, avec la crise de 1929. La situation n’était-elle pas plus compliquée après-guerre ?

M. T. : 1929 ce n’était que les prémices de ce qui nous attendait avec des gouvernements dirigés par le système monétaire : la ruine. Le Front populaire est né de ça. Je dirais que l’après-guerre a été moins compliqué car durant toute une période, les forces vives de la nation ont été unies. Derrière le général de Gaulle et un programme, que nous avons appliqué avec des ministres communistes à la pointe du combat : Ambroise Croizat pour la Sécurité sociale, Marcel Paul qui a doté la France d’un réseau électrique digne de ce nom, Anicet Le Pors.

D’où vient cette aspiration au programme des Jours heureux ?

M. T. : Elle est le résultat du combat de la Résistance contre l’occupant. Le pays avait souffert, un quart de la population avait quitté le Nord pour se rendre au Sud, sous la pression du régime de Vichy. Ce programme était un exemple de ce qu’il fallait faire pour le besoin du pays : une gouvernance fondée sur le bien-être du peuple.

Est-ce que quelque chose de similaire peut sortir de cette crise ?

M. T. : Ce n’est pas comparable. L’ennemi que nous combattions était connu. Aujourd’hui, c’est plus diffus. On connaît ceux qui dirigent les affaires de la France. Dans le cas de cette crise, ils prennent des mesures qu’ils pensent nécessaires. Il nous est difficile de les contester, si ce n’est la limitation exagérée des libertés démocratiques par des mesures pas toujours nécessaires. C’est quelque chose d’indécent. Je me suis toujours battu contre.

La manière dont cela a été accepté par les Français vous a surpris ?

M. T. : Quand vous vous battez contre quelque chose que vous ne connaissez pas et dont le danger est avéré, il y a des raisons d’avoir des craintes et d’accepter. D’autant qu’il s’agit, en grande partie, de mesures de protections des hommes et de la population. On peut remettre en cause des détails éventuellement mais il est difficile de contester. L’absence de masques n’est pas le fruit de la politique de ce gouvernement mais de la façon dont les affaires ont été menées depuis des années, en faisant reculer les intérêts de la population, y compris ce qui lui est le plus nécessaire, comme les hôpitaux et les médecins.

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