Jean-Marie Maris, l’hommage de la ville à un de ses héros

Jean-Marie Maris, l’hommage de la ville à un de ses héros

Histoire. Cet enfant de Castelnaudary a une rue qui porte son nom.

Magnifique moment d’émotion, jours de la Journée souvenir consacrée à a Déportation avec, cette année, l’hommage rendu à Jean-Marie Maris (Lafage 1888-1945 Auschwitz) par le Centre Lauragais d’Etudes Scientifiques et ses deux petits-fils Jean-Marie et Dominique Maris. L’occasion de dévoiler la nouvelle plaque de rue consacrée au résistant déporté Jean-Marie Maris.

25 Résistants arrêtés par les Allemands
« Nous sommes au printemps 1944 ; pour aider à la libération de la France, des maquis voient le jour à proximité de Castelnaudary, à Gaja-la-Selve et au Mas-Saintes-Puelles. Après s’être emparés d’armes dans les gendarmeries locales, ils mènent la vie dure à l’ennemi, mais subissent de lourdes pertes, tant du fait des combats et que des arrestations. C’est ainsi que fin juin, 25 résistants sont arrêtés par les Allemands, aidés de la Milice ; Jean Marie Maris était l’un d’eux et voici son histoire », rappellent Michel Dauzat et Pierre Barbaud..

Jean Marie Maris et Dominique Maris feront la lecture de la lettre rédigée par Michel Dauzat.

Né le 11 décembre 1888 à Lafage dans l’Aude, Jean Marie Maris effectue sa scolarité à l’école publique du village et y obtient son certificat d’études primaires. Incorporé le 1er octobre 1909, il rejoint le 1er régiment de hussards, stationné à Béziers. Rentré au village après son temps d’armée, il s’y marie en 1912 avec Antoinette Marie Benazet ; de cette union, naîtront 3 enfants, Clément François Jacques (né et décédé le 22 septembre 1918), Clément Augustin Marius (9 septembre 1920-2 juin 2011) et Denis FrançoisJoseph Laurent (né et décédé le 3 mars 1925).Maréchal-Ferrant installé à Saint-Martin-Lalande, il doit à nouveau quitter le Lauragais car il est mobilisé pour toute la durée de la Première Guerre mondiale, tout d’abord au 1er régiment de hussards puis au 9e régiment d’artillerie. En 1929, il s’installe à Castelnaudary et se spécialise dans la réparation de machines agricoles et de cycles.

Militant du parti radical-socialiste (SFIO), fervent patriote, il ne peut accepter l’occupation allemande et en.

novembre 1942, il intègre l’Armée Secrète, mise en place à Castelnaudary par Alfred Paul, dit Jules Mouton, et Pierre Paul Gaillard. Grâce à son véhicule gazogène, il effectuera de nombreuses et périlleuses missions jusqu’à ce jour funeste du 25 juin où il sera arrêté à la suite démantèlement du maquis du Mas-Saintes-Puelles.

Interné et déporté à Buchenwald
Membre de la Résistance intérieure française, il est déporté puis interné au camp de Buchenwald, sous le matricule 80945, avec le statut de prisonnier politique français. En avril 1945, il est transféré par convoi en direction du camp d’Auschwitz et décède au cours du trajet le 18 avril 1945, payant de sa vie son attachement profond à sa patrie.

« Son acte de décès est transcrit à Castelnaudary le 24 septembre 1946. En marge de celui-ci sont inscrites les mentions « Mort pour la France, mention faite le 29 juillet 1949 » et « Mort en Déportation, mention faite le 9 janvier 1996″. Par délibération du 12 janvier 1959, le conseil municipal a décidé qu’une rue de la ville porterait son nom, rappelant ainsi à tous l’homme courageux qu’était Jean Marie Maris », souligne M. Dauzat tandis que Jean-Marie Maris relevait : « En cette journée du Souvenir des Déportés, je suis particulièrement ému et fier de participer à cet hommage posthume rendu à mon grand-père. Son sacrifice pour la France ne doit pas être oublié, de même que les vingt autres personnes de Castelnaudary décédées en déportation. Hommage à eux ! »

Merci à Michel Dauzat qui a partagé ses recherches avec nos lecteurs.

JNR 2021

JNR 2021

Parmi les différentes initiatives qui se tiendront ce 27 mai 2021,
Journée d’étude en ligne
« Daniel Cordier (1920-2020) »
Jeudi 27 mai 2021 après-midi
Institut national du patrimoine, Élèves-conservateurs et conservatrices
Musée de la Libération de Paris -musée du général Leclerc- musée Jean Moulin
Disparu le 20 novembre 2020 à l’âge de 100 ans, Daniel Cordier a été tour à tour résistant de la première heure et secrétaire de Jean Moulin, galeriste et collectionneur, historien mais aussi mécène des musées français. Il a tenu, par la donation de sa collection, à partager son regard singulier sur l’art. Soucieux de dépasser les classifications traditionnelles, Daniel Cordier a souhaité mêler art contemporain et objets ethnographiques et a osé défendre des artistes à la marge. Cette journée d’étude vous invite à découvrir ou à redécouvrir les différentes facettes de cette personnalité hors normes.
I. Daniel Cordier, de la résistance à l’art
Bénédicte Vergez-Chaignon, docteure en histoire (Sciences Po Paris) et spécialiste de la France sous l’Occupation, notamment auteure d’une biographie de Jean Moulin en 2018.
II. Daniel Cordier, collectionneur-marchand – marchand collectionneur : entre engagement artistique
et stratégies commerciales
Daniel Cordier, marchand d’art singulier, Julie Verlaine, maîtresse de conférences en histoire contemporaine à l’Université Paris 1 et membre junior de l’IUF.
Baptiste Brun, maître de conférences en histoire de l’art à l’Université Rennes 2, co-directeur du département d’histoire de l’art et d’archéologie de l’Université Rennes 2.
III. « Le Cabinet des horizons », du collectionneur au donateur
Jean-Hubert Martin, historien de l’art, directeur du Musée national d’art moderne de 1987 à 1990.
Témoignage audiovisuel inédit d’Alfred Pacquement, conservateur général honoraire du patrimoine, directeur du Musée national d’art moderne de 2000 à 2013.
­ Témoignage audiovisuel inédit d’Alain Mousseigne, historien de l’art, conservateur du musée des Abattoirs de 1995 à 2012.
Conclusion – table-ronde
Daniel Cordier, Un héritage travaillé au présent
17 h 15
Annabelle Ténèze, conservatrice du patrimoine, directrice du Musée des Abattoirs – Frac Occitanie Toulouse depuis 2016.
Antoine de Galbert, collectionneur, fondateur de la Maison Rouge.
Bénédicte Vergez-Chaignon, docteure en histoire (Sciences Po Paris) et spécialiste de la France sous l’Occupation, notamment auteure d’une biographie de Jean Moulin en 2018
Inscriptions sur museeML.publics@paris.fr
PRÉPARONS LE 80e ANNIVERSAIRE DES EXÉCUTIONS DE CHÂTEAUBRIANT

PRÉPARONS LE 80e ANNIVERSAIRE DES EXÉCUTIONS DE CHÂTEAUBRIANT

« Vous qui restez, soyez dignes de nous, les 27 qui vont mourir »
Guy Môquet, 17 ans

Il y a quatre-vingts ans, 27 patriotes français, détenus au camp de Choisel, ont été fusillés par les Allemands dans la carrière de Châteaubriant, le mercredi 22 octobre 1941 entre 15h50 et 16h10. Militants de la CGT et/ou du PCF, ce tragique évènement marqua un tournant dans l’histoire de l’Occupation, en commençant à faire basculer une grande partie de l’opinion publique en faveur de la Résistance.
Cette exécution de masse généra immédiatement une vague d’émotion qui peu à peu s’étendit dans tout le pays ainsi que dans le monde libre. Aux yeux de leurs camarades de lutte, ces otages furent considérés comme des héros, morts pour la France. Soyons nombreuses et nombreux à leur rendre hommage en cette année anniversaire mais aussi face à la montée du fascisme polissé…
En route pour le 80e anniversaire !
Retrouvons-nous toutes et tous, le dimanche 17 octobre 2021, à partir de 13h30, à la Sablière, la Carrière des fusillés (44110 Châteaubriant) pour commémorer ce tragique événement, pour la 80e fois.
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Amicale de Châteaubriant


Amicale de Châteaubriant Voves Rouillé Aincourt
Carine Niles

Daniel Cordier : le résistant du marché de l’art

Daniel Cordier : le résistant du marché de l’art

ENCHÈRES. Du 28 avril au 4 mai, Sotheby’s disperse en ligne les dernières reliques artistiques du collectionneur, mécène et marchand d’art décédé en novembre dernier.

Par

Récemment disparu, Daniel Cordier, ancien compagnon de la Libération et secrétaire de Jean Moulin, fut également l’un des marchands d’art et collectionneurs les plus actifs de l’après-guerre. En 2018, la maison Sotheby’s dispersait à Paris la première partie de la collection de l’auteur d’Alias Caracalla. Une vente en « gants blancs » (100 % des lots trouvèrent preneur) qui totalisa plus de 4 millions d’euros d’adjudications. Pour autant, la collection du vénéré combattant de la résistance française ne s’arrêtait pas là.

Il lui restait, en effet, des centaines d’œuvres d’art qui tapissaient les murs de son appartement. « Daniel a toujours eu un besoin presque maladif d’accumuler des objets, d’en acquérir et d’en découvrir de nouveaux. C’était un vrai collectionneur, boulimique. Il lui était intolérable de vivre les murs nus », souligne Olivier Fau, senior director, spécialiste international des ventes chez Sotheby’s et mandataire de la succession Daniel Cordier.

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La valise secrète de Jean Moulin donnée à la ville

La valise secrète de Jean Moulin donnée à la ville

Une valise ayant appartenu à Jean Moulin et qui a servi à transporter des documents secrets de la France libre, durant la Seconde guerre mondiale, a été donnée à la municipalité de Béziers. Dans la ville natale de ce héros de la Résistance, une foule d’éléments historiques retrace sa vie.

C’est un enfant de Béziers devenu un héros national. Ici, on rencontre souvent Jean Moulin. Si son image est familière, ses objets le sont un peu moins. Une valise vient d’être donnée récemment par la petite fille de Daniel Cordier, l’ancien secrétaire de Jean Moulin, à la municipalité de Béziers, ville natale du chef de la Résistance pendant la Seconde guerre mondiale.

Ce bagage a accompagné le héros dans ses missions pour la France libre. La valise est d’un gris métallique, légère et fragile, elle est faite en carton. Jean Moulin avait confié cette valise à Daniel Cordier avant son arrestation en 1943. Difficile de savoir ce qu’elle a pu contenir, mais cette valise est chargée d’histoire.

Jean Moulin a aussi beaucoup combattu par les mots, il a également dessiné sous le nom de Romanin. La ville de Béziers a dans ses réserves près de 600 dessins.

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Le documentaire « Colette » sur le frère résistant d’une retraitée caennaise primé aux Oscars à Los Angeles

Le documentaire « Colette » sur le frère résistant d’une retraitée caennaise primé aux Oscars à Los Angeles

Le documentaire « Colette », qui suit une retraitée caennaise sur les traces de son frère, résistant déporté dans un camp de concentration allemand en 1943, a remporté l’Oscar du meilleur film documentaire court à Los Angeles, dans la nuit de dimanche à lundi.

Le film documentaire « Colette », qui suit une retraitée caennaise sur les traces de son frère, résistant déporté dans un camp de concentration allemand en 1943, a remporté l’Oscar du meilleur film documentaire court à Los Angeles, dans la nuit de dimanche à lundi.

« Cette récompense est un hommage aux femmes partout dans le monde, qui se tiennent les unes les autres par la main et qui luttent pour la justice », a déclaré en anglais Alice Doyard, coréalisatrice du film avec Anthony Giacchino, au moment de recevoir l’Oscar, avant d’ajouter : « Vive la France ». Le film, produit pour la BBC et The Guardian, est disponible en ligne.
POUR UN 25 AVRIL 2021 VISIBLE PARTOUT EN FRANCE !

POUR UN 25 AVRIL 2021 VISIBLE PARTOUT EN FRANCE !

Une fleur, un bouquet, une photo, un dessin, une affiche, un poème sur les monuments aux morts, les plaques du souvenir de toutes les victimes du nazisme des communes
76 ans après le retour des derniers déportés libérés, le souvenir de la déportation demeure dans notre mémoire collective et ne doit pas s’effacer.
Ce que furent les camps d’extermination et de concentration nazis et l’horreur vécue par les millions d’êtres humains qui en furent victimes, n’est pas une simple page documentaire de l’histoire du XXe siècle. L’humanité y a été atteinte dans ce qu’elle a de plus sacré.
Des êtres humains étaient catégorisés en surhommes et sous-hommes, leurs vies jugées « dignes ou indignes d’être vécues » sur décision d’un État qui avait érigé en programme politique sa conception raciste et eugéniste du monde et l’a portée à son paroxysme dans l’univers concentrationnaire.
Des hommes, des femmes et des enfants ont été envoyés dans des centres d’extermination ou dans des camps de mort lente, par un système qui niait leur appartenance à l’espèce humaine et s’employait à leur faire perdre conscience de leur propre humanité.
Pourtant, dans les pires circonstances, beaucoup ont su résister à la terreur et à la déshumanisation par la force de l’esprit et la solidarité. Leur engagement et leur combat sont un exemple à suivre.
Il nous faut aujourd’hui encore résister à de nouvelles formes de fanatisme et de barbarie qui entendent promouvoir une vision raciste de l’humanité et détruire la liberté et la démocratie par la terreur.
De nouvelles menaces nous rappellent la communauté de destin qui unit l’humanité au-delà des différences culturelles, ethniques ou religieuses et des antagonismes idéologiques, politiques ou économiques.
Face à ces périls, l’espoir réside dans l’engagement de tous et en particulier des jeunes générations, à l’exemple des déportés, au service de la liberté et vers des formes nouvelles de résistance et de solidarité.
À tous les déportés, victimes des génocides ou de la répression, nous rendons aujourd’hui un hommage solennel, et nous saluons respectueusement leur mémoire.

Ce message a été rédigé conjointement par
La Fédération Nationale des Déportés, Internés, Résistants et Patriotes (FNDIRP)
La Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD)
et les Associations de mémoire des camps nazis,
L’Union Nationale des Associations de Déportés Internés de la Résistance et Familles (UNADIF-FNDIR)

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Le programme du CNR dans la dynamique de construction de la nation résistante

Le programme du CNR dans la dynamique de construction de la nation résistante

Le programme du CNR dans la dynamique de construction de la nation résistante
Claire Andrieu
Dans Histoire@Politique 2014/3 (n° 24), pages 5 à 23

L’histoire du programme du Conseil national de la Résistance (CNR), de sa genèse et de son devenir dans la vie politique de la France libérée, offre l’occasion de réexaminer la dichotomie théorique entre la nation et la Résistance. Dans ce domaine, l’historiographie a évolué. Depuis les années 1980, la thèse du « mythe résistancialiste » s’est installée peu à peu. Développée dans l’ouvrage fondateur d’Henry Rousso, Le syndrome de Vichy [1][1]Henry Rousso, Le syndrome de Vichy. 1944-198…, Paris, Seuil,…, elle fait maintenant partie des vérités établies transmises dans les manuels scolaires. Nécessairement simplifiée par ces filtres, elle a abouti à la création d’une mémoire historique générationnelle pour laquelle la Résistance est une construction mémorielle d’après-guerre plutôt qu’une réalité. Mises en position de montrer leur savoir, les générations nouvelles mettent tranquillement en doute l’existence de la Résistance. Bien que contrebalancée par d’autres vecteurs pédagogiques et culturels, une forme de révisionnisme s’installe. Cette situation historiographique n’a pas manqué de susciter des réponses. Les plus directes sont celles de Pierre Laborie et de Laurent Douzou, dont les travaux récents montrent que l’idée d’un « mythe résistancialiste » qui aurait dominé les trente années suivant la Libération est une construction datée et discutable [2][2]Pierre Laborie, Le chagrin et le Venin. La France sous….

2L’histoire du programme du CNR et de son destin dans les années de Libération apporte à ce débat des éléments de réponse. Les résistants étaient eux-mêmes soucieux de représenter la nation. Le premier d’entre eux, le général de Gaulle, était conscient du risque de dichotomie. Recevant pour la première fois, le 6 septembre 1944, les membres du CNR, il leur dit sans fard : « Il y a la Résistance, Messieurs, mais il y a la Nation. Ensuite il faut que la Nation sente que la Résistance l’exprime, car on n’impose pas ses idées à la Nation, c’est la Nation qui vous les impose [3][3]Jacques Lecomte-Boinet, représentant de Ceux De La Résistance…. » Même si l’on fait la part du caractère tactique du propos exprimé dans ce contexte, il manifeste clairement une problématique vécue.

3Or l’exemple du programme du CNR montre non seulement la bonne insertion de la Résistance dans la nation, mais son intégration dans le courant transnational de modernisation de l’État, dont le retour à la paix et à la liberté allait permettre l’épanouissement en Europe. Le CNR a contribué à la construction d’une Résistance, nationale parce que démocrate, et transnationale parce que moderne, et dont la victoire, rendue possible par les Alliés, a déterminé la rupture économique et sociale de 1944-1946. Dans ce domaine, loin d’être une parenthèse dans la vie politique française, la Résistance a imprimé une marque durable sur les structures économiques et sociales de la nation. Cette marque n’aurait pas tenu plus de trente ans si elle avait été le fait d’une minorité coupée de la population.
La dynamique de construction de la Résistance
4Le programme du CNR est un élément parmi d’autres dans la dynamique de construction de la Résistance à l’échelle nationale. Il ne l’a pas créée mais il y a fortement contribué. Cette dynamique unitaire ou cette réaction en chaîne, quelle est-elle ?

5La Résistance unifiée telle qu’elle se manifeste par la création du CNR en 1943 est le fruit d’un long travail d’unification par en bas, qui a commencé sur le terrain dès 1941. C’est ainsi par exemple qu’en zone sud, les journaux clandestins créés en 1940, – Liberté, de François de Menthon et de Pierre-Henri Teitgen, et Vérités, d’Henri Frenay –, fusionnent à la fin de 1941 pour donner Combat, et qu’ensuite, en janvier 1943, les mouvements Combat, Franc-Tireur et Libération (sud) se fédèrent, cette fois sur l’impulsion de la France libre, pour former les Mouvements unis de Résistance (MUR). En août 1943, les MUR accueillent encore quatre autres mouvements, de zone nord ceux-là : Défense de la France, Résistance, Lorraine et Voix du Nord. L’ensemble de ces mouvements et journaux constituent le Mouvement de libération nationale [4][4]Sur ces différents mouvements, voir François Marcot (dir.) avec….

6Le fait même que la Résistance se soit construite par rapprochements successifs et fédération progressive de groupes distincts, est un indicateur de l’impetus social à la base qui poussait à la résistance et à l’unité. On peut prendre comme contre-exemple les groupes collaborationnistes qui, eux, n’ont pas réussi à unir leurs forces, et l’ont d’ailleurs rarement tenté. En 1942-1943, Marcel Déat essaya de créer un Front révolutionnaire national (FRN) autour du Rassemblement national populaire (RNP) qu’il dirigeait, en fédérant des groupes collaborationnistes. Lancé en septembre 1942, le Front se défit dès le mois de mai 1943 avec le départ des francistes qui refusaient de se subordonner au RNP [5][5]Philippe Burrin, La dérive fasciste. Doriot, Déat, Bergery,…. La Résistance aussi a connu les difficultés et les conflits liés à la part de subordination entraînée par la fusion ou la fédération, mais elle a pu surmonter ces crises du fait de la poussée sociale à la base en faveur de l’unité face à l’occupant. Les alliances et les fusions internes à la Résistance révèlent ainsi la dynamique sociale qui sous-tend la Résistance.

7Naturellement, la transformation d’une pluralité de groupes résistants en une Résistance nationale a aussi été le fait de la France libre, qui avait réussi à s’imposer auprès des résistants de l’intérieur comme interlocuteur central et donc fédérateur. On sait, pour prolonger le parallèle avec les mouvements collaborationnistes, que Hitler ne portait aucun intérêt à ces derniers. Les tenants du national-socialisme pour la France se trouvaient confrontés à eux-mêmes, à leurs rivalités et aux manœuvres parfois contradictoires des différents organes de l’occupant. Ils étaient tout autant dépourvus de catalyseur extérieur que de base sociale.

8La France libre se posait, par ailleurs, en instance pré-gouvernementale résolument pluraliste. La dernière tendance manquant à l’appel, le Parti communiste, rallia physiquement Londres en la personne de son envoyé Fernand Grenier en janvier 1943. De même inspiration que la France libre, la composition du CNR clandestin est aussi pluraliste. Elle est représentative d’un large éventail de mouvements de résistance, des diverses confédérations syndicales et de toutes les tendances politiques nationales à l’exclusion de l’extrême droite [6][6]Pour la composition du CNR, se reporter au cahier central de la…. Le CNR est d’abord le reflet du caractère trans-partisan, trans-clivages d’une manière générale, de la lutte pour l’indépendance nationale. Mais l’affichage démocratique de la diversité, au CNR comme au Comité français de libération nationale (CFLN), est aussi un facteur d’accélération de la nationalisation de la Résistance. Il en légitime les différentes tendances, autorise d’avance les conflits entre elles et manifeste ainsi l’attachement de ses membres aux principes et aux pratiques démocratiques. Le CNR n’était pas une structure artificielle et formelle. Si cela avait été le cas, sa cohésion aurait volé en éclats au premier conflit sérieux qu’il a rencontré en interne. Or son histoire est traversée d’une multitude de conflits.
Une fabrique patiente du consensus
9Les méthodes de régulation des conflits au sein du CNR et les modalités du travail collectif témoignent, aussi, du caractère national/démocratique de l’entreprise. Le texte du programme a été longuement débattu et négocié entre les tendances, sur un intervalle de temps couvrant neuf mois. Pourtant, les circonstances ne se prêtaient guère aux discussions et aux échanges prolongés.

La clandestinité : une autre vie politique
10C’est un contresens souvent commis que d’étudier la vie clandestine à l’aide des catégories d’analyse en usage pour la vie politique des temps de paix et/ou de liberté. L’ensemble du vocabulaire politique change de sens lorsqu’une action en opposition ou la simple expression d’une opinion divergente signifie la privation de liberté ou pire encore. Les critères quantitatifs et qualitatifs usuels pour le champ politique libre ne sont pas directement applicables au champ résistant. L’exemple du CNR le montre assez bien.

11Déjà sur le moment, les Alliés ont eu une certaine difficulté à appréhender le phénomène résistant. La manière dont le New York Times a annoncé la création du CNR l’illustre. Dans son numéro du 14 mai 1943, il titre « « Monsieur X » Named to French Committee ; De Gaulle Announces Resistance Council », comme on annoncerait la formation d’un cabinet ministériel. Le journal évoque aussi des rumeurs selon lesquelles « Monsieur X » serait Albert Lebrun ou Paul Reynaud. Quand on sait ce qu’étaient les conditions de vie des résistants, ce qu’ils pensaient de la Troisième République et de la personnalité d’Albert Lebrun en particulier, ces rumeurs font sourire. Au sujet du dernier président de la Troisième République, de Gaulle écrira plus tard dans ses Mémoires de guerre : « Au fond, comme chef de l’État, deux choses lui avaient manqué : qu’il fût un chef ; qu’il y eût un État [7][7]Charles de Gaulle, Mémoires de guerre. Le Salut, Paris, Plon,…. » En 1943, la France libre a simplement démenti. Sans souligner l’ampleur du contresens contenu dans la rumeur, elle a fait savoir qu’Albert Lebrun était en résidence surveillée et que Paul Reynaud était interné en Allemagne.

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