La honte
17 juin 1940, Philippe Pétain, qui avait entamé des pourparlers avec l’Allemagne de Hitler, lance un appel radiophonique aux Français dans lequel il indique « j’assume à partir d’aujourd’hui la direction du gouvernement de la France » et déclare « C’est le coeur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat. »
L’honneur
Le même jour, Jean Moulin « ouvre le grand livre de la Résistance ».
« A l’aube du 17 juin, des Allemands de la 8e division d’infanterie arrivent à la préfecture sur les pas des troupes françaises en repli. Des officiers de renseignement se présentent à la préfecture et emmènent le préfet au quartier général. Jean Moulin est sommé de signer un document accusant les troupes noires de l’armée française de massacres de femmes et d’enfants. Ce texte rédigé par les services de l’armée allemande devait être signé par l’autorité du département. Jean Moulin indigné, proteste. Aux injures succèdent les coups et un passage à tabac en règle. Il est conduit au lieu-dit La Taye près de Saint-Georges-sur-Eure, où huit cadavres mutilés lui sont montrés. Jean Moulin devant les corps criblés d’éclats d’obus proteste, objecte que ce sont des victimes des bombardements le 14 juin.
Il est laissé quelques heures pour réfléchir auprès des restes d’une femme. A la nuit tombante, non sans avoir insisté violemment pour qu’il signe, les Allemands l’enferment dans la loge du concierge de l’hôpital civil en compagnie d’un Sénégalais fait prisonnier. Craignant de finir par céder, Jean Moulin tente de se suicider en se tranchant la gorge avec des morceaux de verre à terre. » Et pourtant, je ne peux pas signer [÷] Tout, même la mort [÷] Les boches verront qu’un Français aussi est capable de se saborder [..]. Je sais que ma mère, me pardonnera lorsqu’elle saura que j’ai fait cela pour que des soldats français ne puissent pas être traités de criminels et pour qu’elle n’ait pas, elle, à rougir de son fils « . Découvert à l’aube couvert de sang, il peut être sauvé. Il est ramené à la préfecture et s²ur Aimée lui prodiguera les meilleurs soins. Les supérieurs de ces officiers allemands évoquent mal à l’aise, un » malentendu « . »
Frantz Malassis
Fondation de la Résistance / Musée de la Résistance en ligne
Jean Moulin (Max) raconte son « premier combat » dans un ouvrage paru aux éditions de Minuit et préfacé par le général De Gaulle.
Le même 17 juin, Charles de Gaulle, opposé à l’armistice, s’envole pour Londres avec le général Spears et le lieutenant de Courcel :
« Pour moi ce qu’il s’agissait de servir et de sauver, c’était la nation et l’Etat. (…) C’est en épousant, sans ménager rien, la cause du salut national, que je pourrais trouver l’autorité. (…) qu’il me serait possible de grouper, parmi les Français, les consentements, voire les enthousiasmes, et d’obtenir des étrangers respect et considération. (…) La première chose à faire était de hisser les couleurs. La radio s’offrait pour cela. »
Charles de Gaulle
Mémoires de guerre
La France libre
Bibliothèque de la Pléiade
pp. 71-73, passim